Maire-info
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Édition du mercredi 7 février 2024
Discriminations

Les fonctionnaires se sentent plus souvent victimes de discrimination que les salariés du privé

L'Insee publie ce matin des statistiques sur les « traitements inégalitaires » et discriminations au travail, où l'on apprend que les fonctionnaires déclarent nettement plus fréquemment être victimes de discriminations que les autres catégories de salariés. Éléments d'explication.

Par Franck Lemarc

Les données de l’Insee portent sur l’année 2021. Cette année-là, 9,1 % des personnes en emploi ont déclaré « avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel ». Ce taux est nettement plus important chez les femmes (11,3 %) que chez les hommes (7 %), ce qui n’a rien d’étonnant puisque le principal motif de discrimination évoqué est le sexisme : parmi les femmes qui se disent victimes de traitement inégalitaire, 30 % citent le sexisme (2 % chez les hommes). Plus les femmes sont diplômées, plus elles déclarent de traitements inégalitaires : 13 % des femmes ayant un niveau bac+3 se jugent discriminées, contre 10 % pour les non-bachelières.

Par ailleurs, plus de 23 % des personnes en emploi « en mauvaise santé »  ou en situation de handicap jugent être victimes de pratiques inégalitaires au travail. 

La troisième cause fréquente de discriminations est l’origine : 4,9 % des salariés d’origine immigrée qui déclarent avoir subi des traitements inégalitaires . Et « plus de la moitié des immigrés [victimes de discrimination] déclarent leurs origines comme motif principal de discrimination », précise l’Insee. 

De façon contre-intuitive, les discriminations selon l’âge touchent davantage les jeunes que les anciens : plus de 15 % des 15-29 ans se sentent victimes de traitements inégalitaires en raison de leur âge, contre moins de 10 % des 50-74 ans. 

14 % des fonctionnaires se sentent discriminés

L’un des enseignements les plus frappants de cette étude est que les fonctionnaires constituent, et d’assez loin, la catégorie la plus touchée par les traitements inégalitaires : près de 14 % des fonctionnaires se disent victimes de discrimination, contre 9 % de l’ensemble des personnes en emploi et un peu moins de 10 % pour les salariés en CDI. 

La seule autre catégorie qui s’approche de ce chiffre est celle des salariés  en CDI dans les entreprises de plus  de 250 personnes, avec près de 12 % de personnes qui s’estiment discriminées. De façon claire, les discriminations augmentent en fonction du nombre de salariés dans les entreprises : dans celles de moins de 10 salariés, à peine un peu plus de 6 % des salariés se jugent victimes de discrimination, soit deux fois moins que dans les très grandes. 

L’Insee avance deux raisons à cette proportion plus importante de fonctionnaires et de salariés des grandes entreprises qui disent avoir subi des discriminations. D’abord, le fait que ces catégories de salariés sont en général en emploi au même poste depuis plus longtemps : 72 % des fonctionnaires, par exemple, ont une ancienneté de plus de 10 ans dans leur administration, contre « 44 % des titulaires d’un CDI ». Ils ont donc, du fait de leur ancienneté, « une plus grande probabilité d’avoir été confrontés à ces situations ». 

Deuxième raison identifiée par l’Insee : les agents de la fonction publique et les salariés des grandes entreprises bénéficient d’une « sensibilisation plus forte »  aux questions de discriminations : campagnes de prévention, dispositifs de signalement, présence de référents… 

Cette enquête est en effet déclarative : elle porte sur le « sentiment de discrimination »  des personnes. Autrement dit, elle ne reflète certainement pas totalement la réalité, puisqu’il existe forcément des personnes qui sont discriminées sans le savoir ou qui ne souhaitent pas l’exprimer. 

Reste que ce sentiment pèse beaucoup sur la qualité de vie au travail : selon l’Insee, 62 % seulement des personnes s’estimant discriminées se disent satisfaites de leur travail, contre 90 % de celles qui ne s’estiment pas victimes de traitement inégalitaire. Un tiers de ces personnes souhaitent même quitter leur emploi, soit trois fois plus que les personnes qui ne se jugent pas être discriminées. 

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