Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du vendredi 14 avril 2017
Terrorisme

Radicalisation : un rapport sénatorial prône une meilleure implication des collectivités locales par l'Etat

Souvent isolées face aux risques de radicalisation sur leurs territoires, les collectivités locales doivent être mieux impliquées par l’État dans la détection des comportements douteux et la prévention des risques, estime un rapport de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales portant sur « les collectivités territoriales et la prévention de la radicalisation ».
Le rapport, mis en ligne hier, dégage 21 recommandations invitant le ministère de l'Intérieur, les préfets, les départements et les communes à mieux faire descendre et remonter les informations sur les « situations à risques ». Il appelle notamment l’État à mieux former et informer les agents des communes, départements et régions pour mieux prévenir les comportements radicaux, notamment en milieu scolaire ou associatif, et réagir face à des groupes ou individus présentant un « risque de radicalisation ». L’Etat doit aussi « pleinement jouer son rôle dans les missions qui lui reviennent. C’est particulièrement le cas en matière de contrôle de l’obligation scolaire ou du fonctionnement des établissements scolaires privés hors contrat », estiment les auteurs du rapport, qui ont constaté que « dans plusieurs départements, les moyens affectés par l’Education nationale au contrôle des situations ne semblaient pas adaptés à l’étendue du problème ».
« Tout ce qu'on propose peut être engagé sans loi »  par le prochain gouvernement, a souligné Jean-Marie Bockel, l’un des deux rapporteurs en présentant son rapport à la presse. « Le soutien de l’État doit aussi être financier », a-t-il ajouté, mais « on est dans l'épaisseur du trait car cela représente quelques dizaines de millions d'euros en plus sur des budgets de plusieurs centaines de millions ».
Le rapport ne se prononce pas, en revanche, sur l'épineuse question de la communication aux maires des noms des fichés S (considérés comme potentiellement dangereux pour la sécurité de l’État) ou même du Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), créé en 2015 et où sont inscrits 17 393 individus, selon l'Unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat). Les deux rapporteurs demandent toutefois que les maires puissent avoir accès, via les préfectures par exemple, à un futur fichier de « quelques milliers de noms »  liés à des comportements avérés « radicaux, à connotation violente ou idéologiquement lourde ».
Le rapport comporte par ailleurs en annexe le compte-rendu de la consultation des élus locaux menée par la mission sénatoriale. Une quarantaine de départements et 638 communes et intercommunalités y ont répondu. La perception de la radicalisation diffère fortement entre les départements et les communes, les premiers se sentant « très majoritairement », contrairement aux secondes, « confrontés à la radicalisation directe ou indirecte », principalement en raison de leurs compétences en matière d’aide sociale à l’enfance, de prévention spécialisée et de protection maternelle et infantile.
Lors de ces consultations, les élus ont aussi mis en avant « leur manque de moyens financiers et humains »  pour mettre en place des actions de prévention de la radicalisation. Plus de la moitié des départements estiment ne pas avoir les moyens nécessaires. « Ce manque de moyens tant humains que financiers est encore plus important pour les communes et intercommunalités répondantes, à forte dominante rurale, puisque plus des neuf dixièmes ne reçoivent pas d’aide au titre de la prévention de la radicalisation », notent les sénateurs. « Plusieurs petites communes nous ont fait part du fait que les moyens humains reposent sur la disponibilité du maire et de ses adjoints », ajoutent-ils.
Les conclusions du rapport sénatorial demandant à ce que les maires soient mieux associés aux politiques de prévention de la radicalisation rappellent les demandes récurrentes de l'AMF à ce sujet. L'association avait du reste signé en mai 2016 une convention de partenariat avec l'Etat sur « la prévention de la radicalisation violente »  afin de « renforcer le partenariat entre les collectivités territoriales et l'Etat pour que les politiques locales des collectivités puissent intervenir en complémentarité de l'action engagée par l'Etat »  (lire Maire info du 20 mai 2016). 
C.N. (avec AFP)
 
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