Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 1er décembre 2017
Finances

Le gouvernement supprime 48 millions de crédits pour l'investissement local

André Laignel, premier vice-président délégué de l’AMF et président du Comité des finances locales, a fait part de sa « stupeur »  hier, dans un communiqué, en apprenant que le gouvernement s’apprêtait à trancher une nouvelle fois dans les crédits alloués aux collectivités. Ce sont cette fois 48 millions d’euros de crédit de paiement qui sont être supprimés sur la DSIL (dotation de soutien à l’investissement local).
Comme cela avait été le cas l’été dernier (lire Maire info du 21 juillet), c’est par le biais d’un « décret d’avance »  que le gouvernement procède à ces coupes. Il s’agit d’un décret annulant certaines lignes de crédit dans le budget de l’année en cours pour financer d’autres missions. Examiné le 28 nombrembre pour avis par les commissions des deux chambres, puis par le Conseil d’État, avant de d'être signé par le Premier ministre, le décret a été publié ce matin au Journal officiel.
Lors de l’examen de ce texte en commission des finances de l’Assemblée nationale, mardi dernier, le rapporteur général Joël Giraud a détaillé les missions qui devaient être abondées par ces transferts de crédit : le financement des dépenses de personnel de plusieurs ministères, « le surcoût des opérations intérieures et extérieures »  du ministère des Armées, les dépenses liées à l’hébergement d’urgence et les surcoûts engendrés par les ouragans du mois de septembre. Dans ce décret d’avance, 843 millions d’euros de crédits de paiement sont supprimés (ce qui, ajouté au décret d’avance de juillet, représente 3,66 milliards d’euros d’annulation, un montant « inédit »  de l’aveu même de Joël Giraud).
De nombreux crédits sont supprimés, officiellement parce qu’ils sont « non consommés ». Pour certains, cela se comprend aisément : par exemple, le retour de près de la moitié des communes à la semaine de 4 jours permet d’économiser sur le fonds de soutien, et il n’est pas illogique que cet argent aille alimenter d’autres postes du budget. Mais les députés eux-mêmes ont eu bien du mal à comprendre pourquoi 48 millions d’euros destiné à la DSIL font partie de cette nouvelle charrette. C’est le cas du président de la commission des finances, Éric Woerth, qui a dit « ne pas avoir l’impression »  que ces crédits étaient sous-consommés, jugeant la situation au contraire « tendue ». Christine Pires Beaune, députée du Cantal, s’est montrée plus véhémente. Contactée par Maire info ce matin, elle souligne que « sur le terrain on nous refuse des dossiers et aujourd’hui on nous dit qu’il y a de l’argent qui n’est pas consommé. On croit rêver ! ». Lors de la séance de la commission des finances, la députée a proposé de montrer au rapporteur « les courriers des maires qui racontent avoir reçu des mails du préfet, leur disant : ‘’On ne vous versera pas la DETR demandée, faute de crédits’’, ce qui met dans le rouge les petites communes ! ».
Valérie Rabault (Tarn-et-Garonne), a aussi fait part de sa colère : « Il y en a assez de cette hypocrisie consistant à dire qu’on annule des crédits de paiement pour 2017 sous prétexte qu’on n’a pas assez de dossiers. On sait très bien que certains préfets n’ont pas signé des dossiers, ce qui permet de dire que l’argent n’est pas consommé ! ». Quant à Philippe Vigier (Eure-et-Loir), il a accusé le gouvernement de vouloir « tuer financièrement les petites communes », pour qui « c’est la double peine » : « Contrairement à ce qui est dit, il y aura sur la durée une baisse des dotations de l’État, et là on touche à l’investissement. » 
André Laignel, dans son communiqué, ne dit pas autre chose, dénonçant un « pied de nez aux élus locaux ». « Sans concertation en amont, une fois de plus, l’Etat supprime en douce certaines de nos ressources. Cela questionne directement la crédibilité de la parole publique et la considération de cette majorité pour les territoires. » 
On peut noter, comme l’a fait en commission Valérie Rabault, que ces coupes franches ne concernent pas que les collectivités. « En additionnant les annulations de crédit des deux décrets d’avance, a-t-elle dénoncé, on a quelques surprises. Le ministère de M. Hulot [Transition écologique et solidaire] se voit privé de 439 millions – c’est énorme ! La culture, de 83 millions. Et devinez sur quoi ça porte ? Le patrimoine ! ».
En additionnant les annulations de crédits de cet été et celle qui est prévue ici, la note est salée pour les collectivités : moins 216 millions d’euros cet été sur la mission Relations avec les collectivités territoriales, notamment sur la DETR et, déjà, sur la DSIL. Moins 48 millions encore cette semaine. Total : 264 millions d’euros.
Franck Lemarc

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