Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 20 novembre 2003
Eau et assainissement

Dépollution de l'eau : une taxe "au sac" d'engrais et d'aliment pour bétail a la faveur à la fois du ministère de l'Ecologie et des députés

La taxe "azote", qui avait fait capoter le projet de loi de l'ancienne ministre de l'Environnement Dominique Voynet, refait surface sous une autre forme : une taxe "au sac" d'engrais et d'aliment pour bétail, qui a la faveur à la fois du ministère de l'Ecologie et des députés. Une mission de l'Assemblée nationale a recommandé mercredi de taxer à l'achat les sacs d'engrais et d'aliments pour bétail, afin d'inciter les agriculteurs à des pratiques plus respectueuses de l'environnement. 55% des nitrates présents dans les eaux de surface françaises sont issus des activités agricoles, selon l'Institut français de l'environnement. L'azote des engrais, des aliments pour bétail et des lisiers des élevages est entraîné dans les sols où il se transforme en nitrates. La moitié du territoire français est désormais classé en "zone vulnérable" avec des teneurs de l'eau en nitrates supérieures à la norme autorisée de 50 milligrammes par litre. La "mission d'information sur les activités agricoles et la protection de l'environnement", présidée par le député UMP du Bas-Rhin Antoine Herth, veut s'attaquer au problème dans une démarche "consensuelle et équilibrée". Elle "écarte résolument" la redevance sur les excédents d'azote proposée par l'ancien projet de loi sur l'eau des ministres Verts de l'Environnement, Dominique Voynet et Yves Cochet, honnie du monde agricole. La mission qualifie de "véritable usine à gaz" cette taxe qui imposait à l'agriculteur une comptabilité de tout l'azote entrant et sortant de l'exploitation. Mais elle réhabilite la redevance "au sac", c'est-à-dire à l'achat par l'agriculteur d'engrais minéraux et d'aliments pour bétail. Cette piste était envisagée il y a trois ans dans les premières réflexions du projet de loi Voynet, avant d'être abandonnée au profit d'une taxe sur les excédents d'azote, jugée plus incitative. La taxe "au sac" a le mérite de la simplicité. Le taux serait fixé en fonction de la quantité d'azote contenu dans les engrais. Pour les aliments, "la plus grande concertation" s'impose, souligne la mission. En effet, les plus gros acheteurs d'aliments azotés sont les éleveurs de porcs et de volailles, "des filières déjà en difficulté". Le produit irait aux Agences de l'eau, des établissements publics qui gèrent les bassins fluviaux et coordonnent les actions de dépollution. La ministre de l'Ecologie Roselyne Bachelot doit présenter fin juin 2004 en Conseil des ministres un nouveau projet de loi sur l'eau, après l'abandon du projet de loi Voynet. Les agriculteurs acquittent aujourd'hui 1,2% des montants perçus par les Agences de l'eau (contre 84% pour les ménages et 14,6% pour les industriels) et perçoivent six fois plus d'aides que ce qu'ils versent. La taxe au sac pourrait rapporter entre 30 et 60 millions d'euros, soit "dix fois plus qu'actuellement", selon la direction de l'Eau du ministère de l'Ecologie. A 60 millions d'euros, elle apporterait la moitié des sommes versées par les Agences de l'eau pour la dépollution agricole. Les montants sont colossaux : on estime à 1,3 milliard d'euros le coût prévisible du programme de maîtrise des pollutions liées aux effluents d'élevage sur 2002-2006 (dont un tiers financé par les Agences). Dans leur rapport, les députés notent que "les plus petits élevages restent en pratique en marge du dispositif" et réclament un effort proportionnel plus important en faveur des petites exploitations.c=

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