Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 17 juillet 2018
Sports

Football professionnel et football amateur : le fossé se creuse

Au-delà des scènes de liesse qu’il suscite sur l’ensemble de l’Hexagone, le deuxième titre de champion du monde de l’équipe de France de football décroché dimanche à Moscou va rapporter gros à la Fédération française de football (FFF). La Fédération internationale (Fifa) va, en effet, signer prochainement à son nom un chèque de 32,5 millions d’euros. Mais cet argent va-t-il aussi irriguer les petits clubs ?
Si nul ne sait encore comment cet argent va être réparti et quels projets il va financer, il n’est pas improbable qu’une part de cette somme soit fléchée en direction du football amateur (14 000 clubs, 2,2 millions de licenciés et 800 000 bénévoles) : « Le grand oublié de ces dernières années », affirme sans détour Joël Abela, délégué général de l’Association française du football amateur (AFFA) en charge des relations et de l’information des clubs.
Confrontés à la « lourdeur administrative et financière imposée par les instances fédérales », « l’épuisement des bénévoles », « la raréfaction de l’argent public », « en quatre ans, ce sont 4 000 clubs de football qui ont disparu en France », a-t-il compté.
Pour tenter de survivre, certains clubs fusionnent entre eux pour mutualiser leurs moyens. Dans les communes rurales, « les petits clubs meurent les uns après les autres ».
Paradoxalement, dans la continuité de l’effet Coupe du monde, le nombre d’adhérents devrait grimper de 10 % à la rentrée de septembre, comme ce fut le cas en 1998. « L'augmentation du nombre de licenciés va nécessiter des moyens financiers, des moyens matériels supplémentaires et également humains », explique Joël Abela à Maire info. S’il espère que la FFF entendra son appel, ce passionné ne se « berce pas de douces illusions ». « En 1998, après la première victoire des Bleus en Coupe du monde, des appels à projets avaient été lancés par la Fédération française de football. Du saupoudrage ! Cela avait permis des rénovations de vestiaires ici ou des réfections de stades là. Ce fut insuffisant. » 
Considérant que « sans les petits clubs, premier échelon de la formation, il n’y aurait pas d’équipe de France [22 des 23 Bleus sélectionnés pour le Mondial 2018 en Russie ont été formés dans un club amateur selon l’AFFA] », Joël Abela souhaiterait que soit instaurée davantage de « démocratie »  au sein de la FFF, épinglée par un rapport de la Cour des comptes pour « son aisance financière »  en mars 2018. Éric Thomas, président de l’AFFA, avait alors fait part de son « écœurement »  sur France Info.
« La gouvernance de la FFF est d’un autre temps », ajoute Joël Abela. « Depuis 2010 (et l’échec de la Coupe du monde en Afrique du Sud), chaque licencié en activité dans un club amateur a le droit de se présenter (à l’élection du comité exécutif) mais pas de voter (seuls 216 grands électeurs votent). Cela n’a donc rien changé : le devenir du club du village du fond de la France, ce n’est pas leur souci. Ce qui compte, ce sont les contrats passés avec Nike, c’est le monde professionnel. » 
Entre autres, l’AFFA demande le renforcement de la Ligue de football amateur (LFA) « pour en faire la véritable interlocutrice du football amateur »  ainsi que la « création d’un statut du dirigeant-bénévole ».
On peut noter qu’hier, à l’occasion de la réception donnée à l’Élysée en l’honneur des Bleus, le président de la République, Emmanuel Macron, a voulu rendre hommage aux petits clubs et aux bénévoles : « N’oubliez pas d’où vous venez ! », a-t-il lancé aux champions du monde, évoquant « les clubs qui vous ont formés »  et « les bénévoles qui ne comptent pas leur temps ». Des déclarations diversement appréciées, notamment au regard de la décision gouvernementale de supprimer les emplois aidés, extrêmement utilisés… par les clubs sportifs amateurs.

Ludovic Galtier

Télécharger les propositions de l’AFFA « pour une gouvernance modernisée de la FFF » .

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