Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 19 janvier 2018
Culture

Lecture publique : la menace d'une taxe suspendue pour cinq ans

Les acteurs de la deuxième édition de la Nuit de la lecture, qui se déroule demain, au premier rang desquels les bibliothèques publiques et les communes accueillantes, vont pouvoir profiter pleinement de la manifestation après la décision hier de la Société civile des éditeurs de langue française (SCELF) de renoncer à taxer la lecture publique en bibliothèque. La SCELF indique que « souhaitant soutenir les bibliothèques dans leur mission de diffusion de la lecture », elle « accepte de suspendre la perception relative à ce droit pendant une durée de cinq ans ». Dans l'attente d'une telle décision, l'Association des bibliothécaires de France (ABF) avait appelé ses adhérents, les élus, et plus largement les « amoureux de la littérature »  à manifester leur désapprobation à l'occasion de cette seconde édition de la Nuit de la lecture.
La discussion sur la taxation de la lecture publique avait débuté mi 2016 avec la demande de la SCELF (1) de faire valoir le droit de représentation des œuvres qui donne lieu à une taxe, comme le prévoit l'article L.122-4 du Code de la propriété intellectuelle, et dont étaient, jusqu'alors, exonérées les bibliothèques publiques dans le cadre de leurs animations gratuites. « Quand la lecture est assurée par un comédien dans le cadre d'une représentation, la bibliothèque rémunère ce dernier », précise Xavier Galaup, président de l'ABF. « L'imposition de cette taxe aurait pu être impossible à supporter financièrement pour nombre de petites bibliothèques, qui, pour certaines, fonctionnent sans budget » , ajoute-t-il. De son côté, Jean-Marc Vayssouze-Faure, maire de Cahors et président de la commission culture à l'AMF, rappelle que les collectivités qui gèrent les bibliothèques sont parmi les premiers soutiens de la culture, « ne serait-ce que par les achats de livres qu'elles financent ». La demande de la SCELF laissait craindre une application de ce même droit de représentation pour les lectures à haute voix dans les écoles, souvent assurées par des associations de bénévoles.
Après plusieurs mois d'échanges sans issue entre l'ABF et la SCELF, la concertation s'était ouverte, sous l'égide du ministère de la Culture, aux organisations d'auteurs (la Société des gens de lettres et la Charte des auteurs et illustrateurs pour la jeunesse) et au Syndicat national de l'édition (SNE). La prise de position de la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, qui s'est dit, le 12 janvier dernier, « opposé »  à la perception de droits sur la lecture à haute voix, semble avoir pesé sur ces échanges. La ministre a salué la décision de la SCELF qu'elle a qualifiée de « constructive ». Les défenseurs de cette exonération comptaient aussi dans leurs rangs des auteurs, dont l'écrivain Daniel Pennac, parrain de la Nuit de la lecture. Par ailleurs, une pétition, « Shéhérazade en colère », avait obtenu, juste avant l'annonce de la décision de la SCELF, 29 000 signatures.
Une dernière réunion, toujours sous l'égide du ministère de la Culture, devrait être programmée prochainement afin de formaliser cet accord. « Avec le développement du numérique et du libre accès aux œuvres, il y a une réflexion à mener sur le juste équilibre à trouver entre la promotion de la culture et le respect des droits des auteurs », commente Jean-Marc Vayssouze-Faure.
S.L.G.

(1) La SCELF gère le droit de lecture depuis le 1er janvier 2016, prenant la suite de la la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD).

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