Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 11 octobre 2024
Budget de l'état

Collectivités : ce que contient le projet de budget pour 2025

Comme prévu, le gouvernement prévoit de prélever 5 milliards d'euros sur les recettes des collectivités et de geler l'enveloppe de DGF. On peut également retenir le report de la suppression de la CVAE, la réintégration de plus de 2 000 communes rurales dans le nouveau zonage FRR et la réduction de 4 000 postes d'enseignants.

Par A.W.

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« Que ce soit l’Etat, les collectivités ou le secteur social, toutes ces administrations doivent être contributives à l’effort de redressement des comptes publics. »  Le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, l’a martelé à plusieurs reprises, hier, lors de la présentation du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 devant la presse : le déficit public, « c’est l’affaire de tous ». 

Ce à quoi les associations d’élus ont déjà largement répondu que ce n’est pas pour autant aux collectivités - qui n’en sont pas responsables - de payer.

Afin de ramener le déficit à 5 % du PIB, dès 2025 (contre 6,1 % annoncés pour 2024), l’exécutif prévoit ainsi de trouver 60 milliards d’euros dès 2025 via, d’un côté, le déblocage de 20 milliards d’euros de recettes supplémentaires et, de l’autre, la réduction de 40 milliards d’euros de dépenses publiques. Ce n’est ni « une cure d’austérité »  ni « un rattrapage fiscal », a assuré Laurent Saint-Martin.

Effort « important »  des collectivités

Pour y parvenir, cependant, cette réduction des dépenses devra être portée par l’Etat à hauteur de 20 milliards d’euros, pour 15 milliards d’euros par le secteur social et, enfin, pour 5 milliards d’euros par les collectivités.

« Ce sera difficile mais nécessaire »  car « si on ne le fait pas la crise qui suivra sera encore plus douloureuse », a mis en garde, pour sa part, le ministre de l’Economie, Antoine Armand.

De quoi braquer les oppositions qui dénoncent un budget « inégalitaire »  et « mal réparti », voire « une boucherie ».

Dans ce contexte, les collectivités territoriales devront donc prendre « leur juste part »  à l’effort de redressement budgétaire - selon les mots de l’exécutif - à travers une ponction de 5 milliards d’euros sur leurs finances, auxquels on peut ajouter la réduction drastique du Fonds vert (qui passera de 2,5 milliards à 1 milliard d’euros) et une augmentation de plus d’un milliard d’euros des cotisations CNRACL contenue dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Le président du Comité des finances locales (CFL), André Laignel, y voit, d’ailleurs, un « hold-up »  sur les finances locales.

Vent debout, les associations d’élus ont déjà largement fait part de leur mécontentement au regard de cet effort que le gouvernement qualifie, lui-même, d’« important ». Un effort qui sera « proportionné au poids des collectivités territoriales dans la dépense publique »  et « tiendra compte de leur situation financière », a voulu rassurer Bercy qui cible, toutefois, toujours « la forte progression des dépenses locales ».

Fonds de précaution : ponction plafonnée à 2 % des recettes

Le dispositif principal de ce plan de 5 milliards d’euros de prélèvements, on le sait depuis le début de semaine, c’est la création d’un « fonds de précaution »  - appelé aussi « fonds de résilience des finances locales »  ou « fonds de réserve au profit des collectivités territoriales »  - de 3 milliards d’euros.

Il impacterait environ 450 des plus grosses collectivités (celles « dont les dépenses de fonctionnement sont supérieures à 40 millions d’euros », détaille l’article 64 du PLF) et sera alimenté par un prélèvement sur les recettes des collectivités « limité à un maximum de 2 % des recettes réelles de fonctionnement ».

Ce prélèvement sera, toutefois, mis en œuvre uniquement lorsqu’est « constaté le dépassement d’un solde de référence », indique le projet de budget, qui prévoit une « exonération pour les collectivités dont les indicateurs de ressources et de charges […] sont les plus dégradés ». Une vingtaine de départements serait déjà ainsi exemptée.

Pour rappel, ce système « d'auto-assurance »  doit permettre la mise en réserve du fonds en 2025 afin d’en restituer l’épargne plus tard ainsi que « le renforcement à partir de 2026 des mécanismes locaux de précaution et de péréquation au bénéfice des collectivités les plus en difficulté ». « La répartition du fonds l’année suivante sera établie après consultation du comité des finances locales », précise Bercy, dans son dossier de presse.

Intercommunalités de France a d’ailleurs publié, hier, une estimation des montants de la mise à contribution des collectivités dans le cadre de ce futur « fonds de précaution », collectivité par collectivité, qui reste, pour l’heure, à prendre avec prudence. 

D’après l’association, « les ponctions de l’État représenteraient jusqu’à 15 % »  de l’épargne brute des intercommunalités alors que celles-ci sont « au pic de leur cycle d’investissement ». Ce qui les obligerait « soit à renoncer à leurs projets, soit à s’endetter lourdement pour honorer les marchés qu’elles ont signés ». Des risques sur l'investissement également pointés par André Laignel.

Gel de la TVA et réduction du FCTVA

Le gouvernement a aussi prévu, dans le cadre de ce plan de 5 milliards d’euros, le gel de l’évolution annuelle des recettes de TVA qui ferait perdre 1,2 milliard d’euros aux collectivités et l’amputation du fonds de compensation de la TVA (FCTVA) de 800 millions d’euros. 

La reconduction des montants de l’année 2024 de TVA ne devrait pas être pérennisée dans le temps puisqu’elle se fera « exceptionnellement pour l’exercice 2025 », indique le PLF. A noter que le fonds de sauvegarde des départements ne sera pas affecté par la mesure.

S’agissant du FCTVA, il est donc procédé à « un abaissement du taux »  à 14,85 % (contre 16,4 % en 2024) à compter de 2025. En outre, les dépenses de fonctionnement sont « exclues de l’assiette éligible », afin de « recentrer le fonds sur son objectif initial : le soutien à l’investissement ». 

Résultat, il est prévu de « supprimer les exceptions que constituent l’intégration des dépenses d’entretien des bâtiments publics, de la voirie, des réseaux payés et des prestations de solutions relevant de l’informatique en nuage pour revenir au régime commun historique du fonds ».

DGF et dotations d’investissement stables

Du côté des dotations, la DGF reste stable et sera maintenue à hauteur d’un peu plus de 27,2 milliards d’euros, comme en 2024. Même chose pour les dotations d’investissement : la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (Dsil), dotation de soutien à l'investissement des départements (DSID) et la dotation politique de la ville (DPV) seront ainsi stabilisées au même niveau que 2024. 

Comme l’a rappelé André Laignel, en début de semaine, « en euros constants, elles sont en recul », puisque cette stagnation ne compense pas la hausse des prix portée par l’inflation (qui vient de repasser sous la barre des 2 %, selon l’Insee). 

D’autant que les collectivités seront sollicitées à hauteur de 487 millions d’euros au titre des variables d’ajustement. Un montant qui « revient à un niveau ante crise, conformément aux recommandations de la Cour des comptes », précise le PLF.

Péréquation : DSU et DSR en hausse

L’augmentation des dotations de péréquation est, elle, poursuivie au même niveau qu’en 2024. Il est ainsi prévu de majorer de 290 millions d’euros les dotations de péréquation des communes : 140 millions d’euros pour la dotation de solidarité urbaine (DSU) et 150 millions d’euros pour la dotation de solidarité rurale (DSR).

La hausse de la DSR sera « répartie au minimum à 60 % sur sa deuxième fraction dite « péréquation », dont la quasi-totalité des communes de moins de 10 000 habitants bénéficie ».  Par ailleurs, la péréquation verticale des départements sera augmentée de 10 millions d’euros.

Quelques ajustements sont également opérés et plusieurs critères servant à la répartition sont « modernisés ».

Report de la suppression de la CVAE

Au regard du contexte budgétaire, la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) est, pour l’heure, reportée, mais reprendra « dans trois ans », a fait savoir le ministre de l’Economie, Antoine Armand. Il est donc dorénavant prévu de supprimer totalement la CVAE en 2030 et non plus en 2027.

Pour rappel, en 2021, l’imposition à la CVAE a, d’abord, été diminuée de moitié avant que sa suppression totale ne soit échelonnée sur quatre années, jusqu’en 2027. Dans ce contexte, le président du CFL a, d’ailleurs, proposé de réaffecter aux collectivités la part restante de cette contribution perçue désormais par l’Etat.

Ruralité : les communes ZRR exclues bénéficieront du dispositif FRR

C’était une promesse de l’ancien gouvernement. Les 2 168 communes exclues, depuis le 1er juillet 2024, du nouveau zonage unique France ruralités revitalisation (FRR) - qui remplace l’ancien dispositif des zones de revitalisation rurale (ZRR) – vont intégrer ce nouveau zonage et donc continuer à bénéficier des exonérations fiscales et sociales de ce dispositif de soutien aux zones rurales en difficulté.

Elles pourront bénéficier à compter du 1er juillet 2024 et « jusqu’au 31 décembre 2027, des effets du dispositif des zones FRR »  puisque « leur situation reste caractérisée par des fragilités géographiques, économiques et sociales », indique l’article du 27 du projet de loi de finances.

Anru et présence postale : crédits abondés par amendements

Les crédits accordés à La Poste et à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) seront, eux, abondés lors des débats parlementaires, a annoncé l’exécutif.

Le gouvernement assure qu’il a l’intention de proposer en cours de débats « certains rehaussements de crédits ». « Cela concernera les crédits du ministère de la Justice, qui seront réévalués, tout comme ceux du ministère de l’Intérieur et du Logement, pour maintenir la capacité d’action de l’Anru, en maintenant le rendement de la mesure de réduction de loyer de solidarité (RLS) au même niveau qu’en 2024 », explique Bercy dans son dossier de presse.

Une nouvelle qui ne devrait toutefois par réjouir les bailleurs sociaux qui réclamaient la fin de la RLS. 

Par ailleurs, un « ajustement de la dotation versée à la Poste et du niveau des crédits consacrés à la restauration de notre patrimoine »  sera également proposé. Pour rappel, le gouvernement avait initialement prévu la suppression de 50 millions d'euros de crédits du contrat de présence postale territoriale. Ce qui avait consterné les élus locaux. Avant de revoir sa copie

Ecoles maternelles et élémentaires : 3 155 postes en moins

Du côté de l’Education nationale, c’est « une véritable saignée »  qui va frapper l’école publique, ont dénoncé les syndicats avec la suppression de 4 000 postes d’enseignants dans le budget 2025.

Justifiée, selon le gouvernement, par une diminution du nombre d’élèves (97 000 élèves en moins annoncés à la rentrée 2025), cette réduction des effectifs frappera surtout le premier degré. 

Dans le détail, les écoles maternelles et élémentaires seront donc les plus touchées avec une réduction de 3 155 postes alors que le second degré public (collèges et lycées) perdra 180 postes, selon des informations du ministère de l’Education nationale relayées par Le Monde. A noter que le premier degré privé verra ses effectifs réduits de 660 postes et enfin le second degré privé de 40 postes.

Il est, en revanche, prévu de créer 2 000 accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) supplémentaires.

Consulter le PLF pour 2025.
 

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