Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 10 avril 2017
Social

Poursuite de la grève en Guyane et premières dissensions

La situation s’est tendue en Guyane vendredi, avec pour la première fois depuis le début de la grève des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre. La relative unanimité qui prévalait jusqu’alors dans le corps social guyanais semble se fissurer. Ce matin, la grève générale se poursuit, avec toutefois des barrages moins imperméables que prévu initialement.
Vendredi après-midi, un commissaire de police a été blessé devant la préfecture de Cayenne. Pour la première fois depuis le début de ce mouvement qui dure depuis deux semaines, les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogène pour disperser les manifestants.
Autre évolution notable survenue en fin de semaine et ce week-end : alors que jusqu’à présent presque toutes les strates de la population – syndicats, salariés, entrepreneurs, commerçants, élus – semblaient unis dans la contestation, cette unanimité commence à se fissurer : alors que des pénuries commencent à se faire sentir dans les magasins et que nombre d’entreprises sont à l’arrêt, alors que l’activité du port est à l’arrêt et que les bateaux de fret, faute d’être déchargés, repartent de Cayenne, plusieurs syndicats professionnels ont appelé à l’arrêt du mouvement, voire se sont retirés du collectif Pou la Guyann dékolé. C’est le cas, par exemple, de la Fédération des très petites entreprises (FTPE). La Fédération du bâtiment et des travaux publics de Guyane s’est dite « prise en otage »  par les barrages et a demandé à l’État de les lever.
Du côté des élus, les mêmes craintes se font jour. La maire de Cayenne, Marie-Laure Pinhera-Horth, a ainsi déclaré jeudi qu’il était « temps d’arrêter la crise », expliquant que l’économie de la Guyane était « déjà dans le rouge », mais que maintenant, « c’est pire ». L’élue, qui assure toutefois qu’elle estime les revendications des grévistes « légitimes », a proposé que la mobilisation s’interrompe le temps de voir ce que le nouveau gouvernement, dans quelques semaines, va proposer.
Ce week-end, plusieurs initiatives – groupes facebook, pétitions – ont vu le jour, pour demander le rétablissement de la libre circulation et la fin des blocus.
En face, une large partie de la population ne veut pas baisser les bras et la mobilisation se poursuit. Hier, les dirigeants du mouvement avaient assuré que la journée d’aujourd’hui serait marquée par des barrages totalement étanches, ne laissant non seulement pas passer les voitures, comme c’est habituellement le cas, mais également, pour la première fois, les piétons, les vélos et les deux roues. Ils ont finalement reculé et les barrages, ce matin, n’arrêtent finalement que les voitures.
Hier, la ministre des Outre-mer, Éricka Bareigts, a diffusé une déclaration en vidéo d’une dizaine de minutes, où elle s’adresse à la population de Guyane pour demander la fin du mouvement. Affirmant savoir que la majorité des protestataires ne « cautionnent pas les violences »  qui se sont déroulées vendredi, elle regrette toutefois qu’une « limite (ait été) franchie ». Pour la ministre, dans la mesure où « 75 % »  des revendications du mouvement « ont obtenu une réponse favorable »  et où « des réponses sérieuses ont été apportées pour la Guyane », les barrages n’ont plus lieu d’être. Si les nouvelles revendications du collectif sont, selon la ministre, « intéressantes », elles doivent être « expertisées », ce qui prend du temps. Si le gouvernement leur donnait une réponse positive, « il s’agirait d’un engagement sans valeur, qui raisonnablement ne pourrait lier le prochain gouvernement ». « La porte du gouvernement »  n’est toutefois « pas fermée »  sur ces revendications.
« Un durcissement des barrages n’est pas une solution », a conclu la ministre. « Les enfants doivent pouvoir retourner à l’école, les entreprises doivent pouvoir reprendre leur activité. L’économie guyanaise ne peut être fragilisée plus longtemps ».
F.L.

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